L'œuvre scientifique de Johannes Kepler
(1571-1630)

 

Un calculateur fou :

Il naît le 27 décembre 1571 à 2h 30m de l'après-midi.
Il a été conçu le 16 mai 1571 à 4h 37m du matin
Gestation 240j 9h 53m

Comment on le sait ? C'est lui même qui fait le calcul... et ça continuera toute sa vie.

Son père est loin, et sa mère "instable"; lui, il est myope, maladif, complexé.
Heureusement le système scolaire du Wurtemberg luthérien est excellent, et Kepler peut fréquenter le séminaire et même l'université. Il poursuit un doctorat en théologie à Tubingen, quand en 1595 l'université de Graz demande un professeur de mathématiques. Il accepte le poste.

Pour attirer plus d'élèves, il ajoute des leçons d'astrologie à son cours. C'est en dessinant des figures du ciel qu'il a l'intuition d'une solution aux grandes questions qu'il se pose :
pourquoi justement six orbes? quelle relation entre leurs distances du Soleil et les périodes de révolutions des planètes?

Les éléments mobiles du monde devaient être en harmonie avec quelque secret divin, et pour cela ils devaient suivre les règles de la géométrie.

Ayant échoué avec des figures planes, il se tourne vers la géométrie solide. Pour lui, les cinq polyèdres réguliers vont structurer le monde:

entre la sphère de Saturne et celle de Jupiter, il insère le cube
Entre Jupiter et Mars, le tétraèdre
Entre Mars et la Terre, le dodécaèdre
Entre la Terre et Venus, l'icosaèdre
Entre Venus et Mercure, un octaèdre

Le miracle réside dans l'accord, sinon parfait en tout cas acceptable, entre ce schéma de Kepler et les distances relatives des planètes au Soleil chez Copernic.

Quant aux éléments immobiles - la sphère des fixes, le soleil et l'espace qui les sépare - ils sont en harmonie avec... la Sainte Trinité.
Et, comme dans la Trinité les partie ont une importance équivalente, ainsi le trois parties du cosmos doivent avoir le même volume.
Ce qui après des longs calculs donne pour la sphère des étoiles une épaisseur de... 2 milles germaniques.
[les voies de la découverte sont plus impénétrables que celles du Seigneur]

L'année suivante il publie tout cela dans le Misterium Cosmographicum, qu'il envoi entre autres à Galilée.
Celui ci répond, le jour même, par quelques formules de politesse.
Les relations entre Kepler et Galilée commencent mal (et ne s'amélioreront pas).
[ Note - Déjà Platon avait identifié les solides réguliers aux atomes (crochus) des cinq substances élémentaires :
La terre == le cube; Le feu == la pyramide; L'air == l'octaèdre; L'eau == l'icosaèdre;
L'éther == le dodécaèdre ]

La rencontre la plus étonnante et la plus fructueuse de l'histoire de l'astronomie.

Début 1600, Kepler se rend à Prague chez Tycho Brahe. Celui-ci lui a conseillé au préalable d'abandonner ses "a priori", et de travailler plutôt sur les résultats d'observations.

A son arrivée, Kepler trouve Tycho et son assistant Longomontanus aux prises avec les données de Mars.
Il convainc Tycho de lui confier la tâche de déterminer l'orbite de Mars, en affirmant qu'il s'en acquitterait... en 8 jours. Cela ne sera pas si rapide...
En 1601 T. Brahe meurt et Kepler hérite de ses données, et aussi de la charge de mathématicien impérial.

Dans le long travail qui l'attend, il est soutenu par une confiance aveugle dans le travail de Tycho. Ecoutons Kepler:
" nous, à qui la grâce divine a donné dans Tycho Brahe un observateur d'une valeur telle qu'il révèle les erreurs commise par Ptolémée [...] nous devons nous donner la peine de découvrir enfin la vraie structure des mouvement célestes "

C'est 8 ans plus tard, après avoir recommencé ses calculs... 70 fois, que Kepler arrive à une solution pour l'orbite martienne.
Il arrive ainsi à préciser l'inclinaison de l'orbite de Mars sur l'écliptique : 1 deg 50'.
Et en prime la bonne intuition : c'est le "corps" du soleil qui domine le mouvement de toutes les planètes.

Au passage, il est obligé de déterminer avec précision le mouvement de la Terre autour du Soleil. C'est alors qu'il se rend compte que la Terre "ralentit" sur son orbite quand elle s'éloigne du Soleil. Il peine toutefois à abandonner le principe de circularité des mouvements célestes (Galilée, par ailleurs, ne se résoudra jamais à croire aux orbites elliptiques).

Astronomia Nova parait en 1609; on y trouve les deux premières lois.

Ensuite il replonge dans 9 ans des calculs, jusqu'à qu'il trouve cette relation entre les dimensions des orbites et leur période qui l'avaient fasciné dès le départ.

En 1619, dans Harmonices mundi libri V, publié à Linz, son oeuvre historique, il expose enfin la 3ème loi, celle qui suggérera à Newton la loi de la gravitation.

Les trois lois de Kepler :

1 - les planètes gravitent autour du Soleil en suivant des trajectoires elliptiques, ce dernier occupant l'un des deux foyers de l'ellipse.

2 - les aires décrites par le rayon vecteur joignant la planète au Soleil sont égales pour des intervalles de temps égaux.

3- pour toute planète gravitant autour du Soleil, le rapport T2 / a3 est constant, T étant la période orbitale de la planète, et a le demi-grand axe de l'ellipse correspondant à la trajectoire de l'astre autour du Soleil.

1611 - Il publie Dioptricae, où on trouve pour la première fois un traitement théorique de la lunette d'approche.

1618-20 - Epitome astronomiae copernicanae. Oeuvre monumentale, qui résume toutes ses connaissances

La dernière œuvre majeure de la vie de Kepler fut les Tabulae Rudolfinae (Tables rudolphines, 1625).

Galilée ne lira jamais les oeuvres de Kepler, trop mathématiques à son goût; même pas Dyoptricae, où Kepler donne la théorie de fonctionnement des lunettes d'approche dont Galilée faisait un grand usage.

=========================

NB Pour tenir la promesse faite à T. Brahe mourant (utiliser pour l'interprétation de ses données le système géo-héliocentrique), dans sa Nouvelle astronomie Kepler présente quatre systèmes:

1) selon Ptolémée
2) selon Copernic
3) selon Tycho Brahe
4) selon Kepler

Différences peu connues entre les 4 systèmes:

dans le 1) les orbites planétaires pont pour centre la Terre
dans le 2) le centre du système est le centre de l'orbite de la Terre (qui ne coïncide pas avec le Soleil)
dans le 3) le centre des orbites de la Lune et du Soleil est la Terre, et pour les autres planètes la position "moyenne" du Soleil.
dans le 4) Le centre des orbes est le Soleil "vrai" (c.à.d. sa vraie position)

Notes :
- Kepler sur les marées - L'expérience montre que tout ce qui est humide gonfle quand la Lune croît, et se dégonfle quand la Lune décroît
- C'est vers 1650 que Huygens (et Newton) calculent la force centrifuge d'un corps pesant en rotation (mv2/r ).


  Toutes les conférences |